Les violons du Roi – Jean DIWO

 

« Les Violons du Roi » de Jean Diwo est un roman historique captivant qui retrace l’histoire des célèbres luthiers italiens et français du XVIIᵉ siècle, tout en plongeant dans le faste de la cour de Louis XIV.

 

Le récit se concentre sur la dynastie des Amati, des Guarneri et surtout sur Antonio Stradivari, des figures emblématiques de la lutherie italienne, et sur les débuts de la lutherie française, notamment à Mirecourt et Paris. Diwo décrit avec passion l’art de fabriquer un violon, les secrets des maîtres luthiers et l’importance de cet instrument à la cour du Roi-Soleil, où la musique était un élément central de la vie quotidienne et des divertissements royaux.

Extraits

“Les violons du roi “(p 118, 119, 120, 121)

Ce n’est que le surlendemain qu’ils arrivèrent dans le village de Selvino, perché sur la montagne au milieu d’une forêt de sapins. -Les voilà nos arbres! s’écria Antonio. Vois leur taille… Et ils sont droits. Dès demain nous allons monter jusqu’à la limite des feuillus, là où il ne reste plus que les sapins et les hêtres. Nous passerons nos gaillards en revue et choisirons les deux ou trois meilleurs. -Tu sauras? demanda Guarneri. -Quand je vivais ici, j’avais neuf ou dix ans, un luthier de Bologne, Giacomo Gherardi, venait de temps en temps chercher un sapin. Je l’accompagnais et il m’apprenait les arbres, comment et pourquoi il choisissait celui-ci plutôt que celui -là, pourquoi il préférait un épicéa poussé près des hêtres.. -Pourquoi en effet? -Parce que les hêtres s’étendent en largeur et obligent le sapin à s’élançer droit vers le haut pour chercher la lumière. Je pense avoir bien calculé l’époque: l ’hiver ou la fin de l’hiver, nous y sommes mais il faut encore que la lune soit descendante. Nous allons regarder le ciel ce soir. -Explique, Antonio. Tu parles par énigmes, comme s’il s’agissait de magie. -Mais le violon, est magie! tu le sais bien et elle commence par le choix du bois! L’hivers et la lune descendante, cela signifie que la sève est au plus bas, condition indispensable pour obtenir plus tard une belle sonorité. Enfin, nous verrons tout cela demain. Quand nous aurons choisi nos arbres, nous discuterons du prix avec les propriétaires. Il faudra aussi trouver des bûcherons car un bon sapin de lutherie n’est pas un gringalet facile à abattre. C’est un arbre vieux de deux siècles et mesurant à sa base plus de trois pieds de diamètre. -Tout cela est fascinant, dit Andréa. Quand je pense que je fabrique des violons depuis plus de vingt ans et que j’ignore tout du bois que j’achète au marchand. Certes je vois bien si je suis tombé sur une bonne coupe et sais démêler le bon du mauvais et du médiocre. Mais pouvoir choisir son arbre!… -Ce sera aussi pour moi la première fois. C’est pourquoi je tenais tant à ce que nous venions. Tu verras les merveilles que nous fabriquerons dans une quinzaine d’années avec notre récolte d’aujourd’hui! Le lendemain, il faisait froid mais le ciel était bleu et annonçait une belle journée ensoleillée. Antonio emprunta à l’hôte chez qui ils avaient dormi une masse de bois, ils enfouirent dans leurs poches d’épaisses tranches de pain, le reste de la mortadelle du voyage et, flanqué de frère Battista dont la robe de gros drap s’accrochait aux taillis, ils commencèrent à monter à travers bois vers la pinède qui flanquait le versant sud de la montagne.

L’archet (“Les violons du roi” p 105 / 106)

Stradivari pensait aussi beaucoup à l’archet, un accessoire capital auquel les luthiers ne s’étaient pas beaucoup jusqu’ici intéressés.
La fabrication des archets était le plus souvent confiée aux débutants. Ce n’était pourtant plus l’outil frustre en forme d’arc simple des premiers instruments à cordes, les violonistes connus exigeaient maintenant des archets soignés, taillés dans du bois d’amourette ou du bois de fer et garnis de crins d’excellente qualité. Les virtuoses Castrovillari et Bassani avaient ainsi travaillé plusieurs fois avec Antonio pour lui faire part de leurs désirs et mettre au point avec lui, devant l’établi, un archet convenant à leur manière de jouer.
Ce genre de collaboration plaisait beaucoup au luthier qui avait toujours souhaité travailler en étroite collaboration avec les utilisateurs de ses instruments. Pour le moment, il n’y avait pas de raison de changer radicalement le forme de l’archet, celle-ci convenant à la musique des compositeurs de l’époque. L’instrumentiste variait la tension de la mèche avec ses doigts, passant de la position “forte” ou “sabrée”, mèche tendue, à la position “pianissimo” mèche détendue.

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